LES LIEUX DE CULTES CHEZ LES CELTES :

Dans les différents courants druidiques, de nombreux désaccords émergent quant aux lieux de culte, qu'il s'agisse du Teges, (du temple gaulois ) ou du cercle de pierres, entraînant ainsi des conflits de chapelles. Pourtant, si l'on se réfère aux sources textuelles et archéologiques, il apparaît impossible de généraliser ou d'uniformiser la pensée et la pratique celtique. Chaque tradition, qu'elle soit gauloise, irlandaise, galloise ou cornique, possède ses propres spécificités et évolutions.Ignorer l'existence du plus ancien lieu de culte d'Irlande, où tous les peuples se rassemblaient pour faire des offrandes lors de la plus grande fête de l'année, relève d'une certaine mauvaise foi. Ce sanctuaire, caractérisé par une pierre centrale recouverte d'or et entourée de douze pierres, illustre clairement l'importance du cercle dans la tradition celtique. Pourquoi faudrait-il le rejeter, simplement parce que, vingt siècles plus tard, certains s'attachent à une seule forme de lieu de culte, méconnaissant la diversité réelle des sanctuaires celtiques ?Même en Europe continentale, où la plupart des structures cultuelles sont quadrangulaires, de nombreux sanctuaires circulaires subsistent. Par exemple, 30 % des sites en Ille-et-Vilaine, six près d'Aleto, et même une structure pentagonale témoignent de cette diversité architecturale. Plutôt que de les nier, les Druides reconstructionnistes s'interrogent sur leur signification et leur raison d'être.
EN GAULE :
Nous pouvons directement dresser une liste de temples celtiques connus, avec leurs formes géométriques caractéristiques :1. Sanctuaire de Gournay-sur-Aronde (Oise, France) - Forme : Enclos quadrangulaire avec un temple central de plan carré. - Particularité: Temple à galerie, fosse sacrificielle avec de nombreuses offrandes (armes, ossements).2. Sanctuaire de Ribemont-sur-Ancre (Somme,France) - Forme: Enclos rectangulaire. - Particularité: Site de sacrifices humains et animaux, associé à des pratiques guerrières.3. Sanctuaire de Corent (Puy-de-Dôme, France) - Forme : Structure circulaire, entourée d'un enclos quadrangulaire. - Particularité : Probablement un centre religieux et politique majeur des Arvernes.4. Sanctuaire de Mirebeau-sur-Bèze (Côte-d'Or, France) - Forme : Grand enclos quadrangulaire avec un temple central à plan carré. - Particularité : Évolue à l'époque gallo-romaine avec la construction d'un fanum.5. Sanctuaire de Gergovie (Puy-de-Dôme, France) - Forme : Temple rectangulaire. - Particularité : Site religieux et militaire, situé sur le plateau de Gergovie, lieu de la victoire de Vercingétorix contre César.6. Sanctuaire du Puy de Dôme (Temple de Mercure, France) - Forme : Base rectangulaire, avec un plan circulaire en élévation. - Particularité : Initialement un lieu de culte celtique avant sa transformation en temple gallo-romain.7. Sanctuaire d'Acy-Romance (Ardennes, France) - Forme : Enclos quadrangulaire avec temple central carré. - Particularité : Importante nécropole et traces d'activités cultuelles.8. Sanctuaire de Roquepertuse (Bouches-du-Rhône, France) - Forme : Structure rectangulaire adossée à une falaise. - Particularité : Célèbre pour ses piliers sculptés avec des têtes coupées, évoquant des rites celtiques liés au culte des ancêtres.9. Sanctuaire du Mont Beuvray (Bibracte, Nièvre, France) - Forme : Temple quadrangulaire. - Particularité : Centre religieux et politique des Éduens, avec une transition vers une architecture gallo-romaine.10. Sanctuaire de Titelberg (Luxembourg) - Forme : Temple central carré avec enclos quadrangulaire. - Particularité : Ce sanctuaire à montre une continuité celtique puis romaine.Caractéristiques générales des temples celtiques :- Formes fréquentes : Quadrangulaire (fanum), circulaire (lieux de culte en plein air).- Enceintes sacrées : Bois sacrés, fosses sacrificielles, enclos en terre ou en pierre.- Évolution : Beaucoup de sanctuaires celtiques ont été transformés en temples gallo-romains.En Irlande et au Pays de Galles, les lieux de culte celtiques étaient souvent des sites naturels considérés comme sacrés plutôt que des temples bâtis comme en Gaule. Ces sites étaient généralement des bois sacrés, des sources, des montagnes, des lacs et des collines, parfois marqués par des structures mégalithiques ou des cercles de pierre.
IRLANDE:
1-Collines sacréesTara (Teamhair na Rí, Comté de Meath) - Type : Colline sacrée avec structures circulaires en terre. - Particularité : Centre cérémoniel des Hauts-Rois d'Irlande, associé au dieu Lug et à la souveraineté. Uisneach (Comté de Westmeath) - Type : Site naturel sacré, sans temple bâti. - Particularité : Considéré comme le centre spirituel de l'Irlande, lié au feu sacré de Bealtaine et à la déesse Ériu.Navan Fort (Eamhain Macha, Comté d'Armagh) - Type : Grand enclos circulaire avec des structures en bois et un tumulus. - Particularité : Centre religieux et politique des Ulaid, potentiellement associé à la déesse Macha.2-Cercles de pierre et mégalithesCarrowkeel (Comté de Sligo) - Type: Cairns mégalithiques et structures circulaires. - Particularité : Site astronomique et rituel pré-celtique, encore utilisé à l'époque celtique.Loughcrew Cairns (Comté de Meath) - Type : Cairns alignés sur des phénomènes solaires. - Particularité : Associé à la souveraineté et aux rites saisonniers.3. Sources sacréesTobar na Mac Rí (Comté de Roscommon) - Type: Source sacrée. - Particularité : Dédiée aux anciens dieux et encore vénérée aujourd'hui.
PAYS DE GALLES :
1-Collines et montagnes sacréesDinas Emrys (Snowdonia) - Type : Colline fortifiée avec structures en pierre.Yr Wyddfa (Mont Snowdon) - Type : Montagne sacrée. - Particularité : Associée aux mythes arthuriens et à des divinités celtiques.2- Cercles de pierre Bryn Celli Ddu (Île d'Anglesey) - Type : Cairn mégalithique avec cercle de pierres. - Particularité : Aligné sur le solstice d'été, ancien centre rituel celtique.Pentre Ifan (Pembrokeshire) - Type : Dolmen mégalithique. - Particularité : Lieu de culte funéraire et possible site druidique.3-Îles sacréesYnys Môn (Île d'Anglesey) - Type : Île vénérée par les druides. - Particularité : Dernier bastion des druides, détruit par les Romains en 60 ap. J.-C.Bardsey Island (Ynys Enlli) - Type : Île sacrée. - Particularité : Connue comme "l'île aux 20 000 saints", lieu de pèlerinage celte.Caractéristiques générales des lieux de culte celtiques en Irlande et au Pays de Galles :- Sites naturels sacrés : collines, sources, îles, montagnes.- Alignements astronomiques : de nombreux sites sont alignés avec le soleil ou la lune.- Présence druidique forte : ces lieux étaient obligatoirement administrés par des Druides, Puisque les auteurs anciens mentionnent la présence des Druides lors de toutes les cérémonies, qu'elles soient publiques ou privées.
Les Druides reconstructionnistes s'efforcent de rester cohérents en adaptant leurs pratiques au territoire et au clan celte dont ils s'inspirent. Un groupe gaulois, par exemple, devrait idéalement privilégier les coutumes de ses ancêtres et pratiquer dans un Teges. Toutefois, il ne doit pas pour autant ignorer ou rejeter les traditions des autres clans celtiques. Le respect des traditions propres à chaque peuple celte va de pair avec la rigueur et l'honnêteté scientifique, et constitue le meilleur moyen de favoriser l'unité des Druides à travers toute la Celtie.Source photographique : https://www.puy-de-dome.fr/.../arc.../plateau-de-corent.html-Carte archéologique de la Gaule - CNRS.

Comme nous l'avons vu dans le premier article sur les lieux de cultes chez les Celtes , nos ancêtres considéraient certains lieux naturels comme sacrés, notamment les sources, les rivières, les montagnes et les forêts, mais aussi des temples de différentes formes, quadrangulaires, circulaires et même pentagonale.Mais ce n'est pas tout : les groupes druidiques sont souvent en désaccord sur la manière dont nos ancêtres pratiquaient leur culte. S'agissait-il de temples, de sanctuaires en pleine nature, ou encore de forêts sacrées ? La réalité archéologique montre une grande diversité selon les peuples celtes. En Gaule, les sanctuaires, comme celui de Corent, étaient courants, tandis qu'en Irlande et en Bretagne, les lieux de culte extérieurs et les temples circulaires semblent avoir été plus répandus. C'est ce que révèle l'archéologie.
LIEUX DE CULTES CHEZ LES CELTES : LES GROTTES ET LES CAVERNES
Et pour apaiser le débat, l'archéologie révèle une grande diversité de lieux de culte et de vestiges, parmi lesquels on peut également compter les GROTTES et CAVERNES sacrées !Plusieurs sites archéologiques montrent une occupation rituelle de cavernes dans le monde celtique, que ce soit en Gaule, en Bretagne insulaire, en Irlande ou en Europe centrale. Voici une liste- pas du tout exhaustive- de grottes et cavernes associées à des pratiques cultuelles chez les Celtes :
FRANCE :
-Grotte de Roquepertuse (Bouches-du-Rhône)– Sanctuaire celtique important avec des statues , des colonnes en pierre, une célèbre tête bicéphale.-Grotte de la Balme (Isère)– Site de cultes antiques, possiblement d'origine celtique.-Grotte d'Isturitz et Oxocelhaya (Pyrénées-Atlantiques)– Preuves d'occupation et de rites de diverses périodes.-Grotte des Fées (Ain)– Lieu de pratiques rituelles avec des découvertes d'objets protohistoriques.-Grotte du Mas d'Azil (Ariège)– Lieu sacré et cimetière à diverses époques.-Grotte de l'Ermite (Pyrénées-Orientales) – Site occupé depuis la Préhistoire, ayant pu servir de lieu de culte.-Grotte du Loup (Dordogne)– Lien possible avec des rites funéraires celtiques.-Grotte du Pas de Joulié (Aveyron)– Possible sanctuaire celtique avec des restes humains et animaux.-Grotte de la Baume (Jura)– Site habité au second âge du Fer, possiblement cultuel.-Agris : Sa grotte a été occupée depuis le mésolithique,au néolithique, à l'âge du bronze, à l'âge du fer où elle était un lieu de culte chtonien dans lequel on a découvert cet extraordinaire casque d'apparat celtique , daté du IVème siècle avant notre ère;à elle seule, cette grotte suffirait à éteindre certaines affirmations étriquées sur les lieux de cultes celtiques, soit-disant sans lien avec les époques précédentes !- Le tome 60 de Gallia mentionne des grottes sanctuaires, dans l'Aveyron, dans l'Hérault.
BELGIQUE ET LUXEMBOURG
-Grotte de Remouchamps (Belgique) – Lieu d'occupation néolithique, mais possible réutilisation par les Celtes.-Grotte de Rochefort (Belgique)– Découvertes de restes osseux et d'objets rituels.-Grotte de Han-sur-Lesse (Belgique)– Site fréquenté depuis la Préhistoire avec des indices d'activités rituelles.-Grotte de Walou (Belgique)– Sépultures anciennes, potentiellement liées à des pratiques cultuelles.-Grotte de Mamer (Luxembourg)– Présence de dépôts d'objets de l'âge du Fer.SUISSE ET ALLEMAGNE -Grotte du Drachenloch (Suisse)– Sanctuaire supposé avec des ossements et traces de rituels.-Grotte de Birseck (Suisse)– Site occupé durant la protohistoire.-Grotte du Teufelsloch (Allemagne)– Associée à des légendes et des pratiques anciennes.-Grotte de Lichtenstein (Allemagne)– Lieu de découverte d'un dépôt d'objets rituels celtiques.-Grotte de Blätterhöhle (Allemagne)– Preuves d'inhumations et de rites anciens.
ILES BRITANNIQUES
-Grotte de Wookey Hole (Angleterre)– Site de culte et de dépôts d'offrandes.-Grotte de Kents Cavern (Angleterre) – Occupation humaine depuis la Préhistoire, rituels probables à l'âge du Fer.-Grotte de Mother Ludlam's Cave (Angleterre)– Légendes locales de pratiques magiques et druidiques.-Grotte de la Reine (Écosse)– Lieu de cultes liés aux divinités féminines celtiques.-Grotte de Smoo Cave (Écosse) – Site lié aux traditions celtiques et aux cultes aquatiques.-Grotte de St. Ninian (Écosse)– Associée aux traditions sacrées préchrétiennes.-Grotte de Poll na bPeist (Irlande) – Grotte rituelle sur l'île d'Inis Mór, associée aux traditions celtiques.-Grotte de Keash (Irlande) – Occupation dès le Néolithique, probable sanctuaire celtique.-Grotte de Dunmore (Irlande)– Légendes associées aux Tuatha Dé Danann, possiblement un site sacré.-Grotte de Uamh an Oir (Écosse, île de Skye)– Connue pour ses légendes liées à la mythologie celtique.- A knowth un souterrain reliait une importante maison médiévale au tumulus et un autre souterrain similaire aboutissait à celui de dowth, montre que ces lieux étaient toujours considérés comme des lieux "magiques" et sacrés, auxquels on se rendait discrètement aux alentours de l'an mille ! Cela veut dire un culte ininterrompu encore à cette époque ( A côté de ces faits, que pèsent des "interdits" modernes?)-Le temple souterrain de Deal, dans le Kent, d'époque celtique, lieu de culte incontestable, situé à côté des cimetières de l'âge dufer, eux-mêmes prenant la suite d'un tumulus de l'âge du bronze, apporte une forme de culte encore différente ... et pas moins légitime !-Les tumulis néolithiques sont tellement "peu" des lieux de cultes actifs à l'époque celtique qu'ils ne sont rien moins que des portes de l'autre monde et mieux encore les résidences des principales Divinités, et tous les principaux sites royaux d'Irlande y sont adossés.
ESPAGNE ET ITALIE
-Grotte de San Adrián (Pays basque, Espagne) – Fréquentation protohistorique avec des éléments rituels.-Grotte d'Altamira (Espagne) – Siège de cultes préhistoriques, potentiellement réutilisé par des Celtes ibériques.-Grotte de Monte Cònero (Italie, région celtique du nord) – Site habité durant la période celtique.-Le sanctuaire-grotte du Mont Gargan ( pas en zone celtique, mais au moins indo-européenne) où l'on continue à distribuer des pierres du lieu comme porte bonheur ...Cette liste regroupe des sites où des preuves archéologiques ou des traditions locales suggèrent une fonction cultuelle chez les Celtes. Beaucoup de ces grottes étaient utilisées comme sanctuaires, sépultures, ou sites de vénération des divinités chthoniennes et aquatiques.- A propos de cultes liés à l'eau, les lieux de cultes ayant rapport à l'eau sont extrêmement nombreux et les aménagements cultuels sont très variés. A titre d'exemple la source de la Seine fort peu aménagée à l'époque gauloise, mais objet de très grande vénération, dont les nombreux ex-votos sont la preuve, encore une forme particulière de lieu de culte pleinement légitime et tellement incontestable ! Dans le même domaine, le site très remarquable de St Père sous Vézelay offre, lui aussi, une continuité remarquable, allant du néolithique à l'époque romaine.
Après les uns et avant les autres, les Druides ont officié, soigné, avec une connaissance remarquable des propriétés des eaux qui varient en fonction du captage, certains d'entre eux, cuvelés au moyen de troncs de chênes de 500 ans et datant du néolithique.Dans ce domaine comme dans d'autres, les Druides anciens, réputés à juste titre parmi les plus grands savants de l'antiquité agissaient de manière appropriée, sans, comme certains, de nos jours, se croire obligés de s'enfermer dans un seul modèle de sanctuaire; si on leur avait dit çà ,
ils auraient surement bien ri !-On peut se demander si ils auraient ri ou si ils auraient été stupéfaits et indignés de lire sous la plume d'un druide moderne:
"Pour les anciens, le spectacle de la nature, intacte, impressionnante et, pour ainsi dire, originelle, suscitait chez eux un certain effroi, qui ne provoquait toutefois pas l'extase mystique. Tout au contraire, le frisson éveillait la raison et des réactions religieuses tout à fait rationnelles. Les forêts profondes, les marécages, les lacs insondables et la haute montagne situés à l'extérieur des espaces habités passaient pour chaotiques, laids et terrifiants, ils n'attiraient personne. (...) ces lieux étaient, de ce fait "abandonnés" aux Dieux."
Que l'on trouve pareille accumulation d'inepties chez Lucain ( Pharsale, III,399-425) ne surprend pas, mais ce tableau fait de clichés est une insulte à la raison, une insulte à la connaissance, une insulte aux anciens Druides ,qui, eux, étaient savants et n'étaient pas gens à se laisser impressionner par des contes à dormir debout, une insulte aux peuples qui habitaient les montagnes et qui étaient parfaitement intégrés avec des agglomérations , des routes, des sanctuaires variés, faisaient du commerce, etc, une insulte à la magnifique organisation des "forêts-frontières", une insulte au fait que les lacs "insondables" étaient aussi très souvent des lieux de cultes et d'offrandes aux Divinités. Sans compter les mentions de sanctuaires forestiers, etc, etc .Comment se peut-il que des gens non dépourvus de sérieux se fassent encore l'écho de telles vomissures intellectuelles aux relents de colonialisme du XIXème en faisant mention de la soi-disant peur des contrées sauvages où, heureusement, Rome, puis, la République Française ont apporté l'heureuse lumière de la "civilisation"?Ce texte est tellement ahurissant qu'il devrait servir d'exemple comme condensé d'idées fausses !Ainsi, c'est bien pour cela que, face à ceux qui cherchent à discréditer ou à dénigrer la pratique des autres en prétendant détenir la vérité absolue, le druidisme reconstructionniste préfère se fonder sur des faits historiques et archéologiques, reconnaît la diversité des pratiques. Qu'il s'agisse de temples carrés, ronds, de bâtiments ou de sanctuaires en extérieur, toutes ces formes de culte ont existé. En définitive, chaque forme de sanctuaire est légitime.
Les sources photographiques :
-Carte archéologique de la Gaule-CNRS-Mairie d'Agris-Histoire de l'art et du sacréVoir les statistiques et les publicitésBooster la publication

POLÉMIQUE CHEZ LES DRUIDES CONTEMPORAINS : VÉNÉRATION DES PIERRES ET RITUELS AUTOUR DES CERCLES DE PIERRE
Une polémique a éclaté récemment, accusant les druides de danser et de tournoyer autour des cercles de pierres, sous prétexte que ces dernières ne devraient pas être vénérées. Pourtant, même les textes anciens attestent que les druides antiques honoraient les pierres. Le Dindsenchas métrique, un texte irlandais, en témoigne clairement : « Depuis le règne d'Éremon... il y a eu l'adoration des pierres, jusqu'à la venue de Patrick... ».Dans son livre, excellent sur bien des points, Les Druides , CJ Guyonvac'h a perdu une occasion de se taire, comme pour la fausse traduction de Tacite sur les femmes en noir, mais on dirait que certains ne retiennent que les erreurs pour baser leur doctrine. "La litholâtrie ne saurait être celtique" Là encore, on voit une suffisance aveugler les données textuelles et historiques.Si l'affirmation - bien que sans équivoque- du Dindsenchas était unique, on pourrait peut-être envisager une erreur, mais, dans ce cas, que faire de toutes les mentions ci-dessous ? les nier ? Certains disent qu'ils suivent l'évolution des recherches pour modifier leurs doctrines et leurs pratiques, mais manifestement c'est faux.Sinon, que dire des ardéchois - des celtes, les Helviens - qui ont utilisé les dolmens pour y déposer leurs morts jusqu'au haut moyen-âge ? Si une coutume qui remonte au néolithique existe encore au moyen-âge, c'est bien qu'elle a perduré sous l'autorité des Druides .Et n'en déplaise à ces derniers, le concile d'Arles, vers 450 ap J-C, qui condamne :"ceux qui,sur le territoire d'un évêque quelconque,ou bien allument de petits flambeaux, ou bien adorent des arbres, des sources ou des PIERRES " Le capitulaire de Childebert Ier qui confirme, le concile de Tours, en 567 ap J-C : « que tous ceux qui accomplissent des actes incompatibles avec les règles de l'église près de PIERRES, arbres ou fontaines, LIEUX manifestes du PAGANISME, soient chassés de la sainte église.. » l'avertissement général de Charlemagne - le "glorieux" massacreur des saxons et de combien d'autres - en 789 ap J-C :"pour ce qui est des arbres, des PIERRES ou des fontaines, où quelques sots allument des feux, ou font d'autres pratiques, nous ordonnons de la manière la plus expresse, que cet usage, le pire de tous et exécrable à Dieu, partout où il se rencontrera, soit extirpé et détruit".Nier cela, c'est se faire, sous prétexte d'orthodoxie- en fait, une accumulation d'erreurs et d'idées reçues, venant polluer et compromettre un travail excellent au départ, le complice des agissements inqualifiables de criminels profanant la notion même de religion pour des questions de pouvoir. L'orgueil et le mensonge à la face du monde. Les Druides qui nient ces faits sont au service de Charlemagne ! Bravo ! Étant donné que Patrick est né vers 386 ap. J.-C., pour revenir à Crom Cruach, il est probable que les Irlandais de cette époque aient eu une vision plus juste que les descendants des dits Druides du XXIᵉ siècle.Dans la mythologie celtique, certaines pierres étaient vénérées pour leurs propriétés sacrées, leur lien avec les Divinités ou leur rôle dans les rites et légendes.-Lia Fáil (Pierre du Destin)– Située sur la colline de Tara en Irlande, cette pierre légendaire criait lorsqu'un roi légitime posait le pied dessus. -Stone of Scone (Pierre du Couronnement)– Pierre utilisée pour l'intronisation des rois d'Écosse, parfois associée aux Celtes. -Cloch Labrais (Pierre de Labraidh)– Située en Irlande, elle aurait la capacité de révéler la vérité lorsqu'une personne parjure parle devant elle. -Pierre de Fal (ou Fal Stone)– Variante du Lia Fáil, parfois confondue avec lui, liée à la souveraineté et à la fertilité. -Pierres du Trésor de Fintan– Fintan, un sage mythique irlandais, aurait eu des pierres sacrées contenant des connaissances ancestrales. La strophe 31 du Dindsenchas métrique (signalée par F Le Roux) mentionne dans la plaine de Taitiu - lieu cérémoniel si il en est- la pierre de Gorp, la pierre de Gar,, la pierre des malades, la pierre des nombres, la pierre des lépreux, etc.-Pierres levées de Manannan Mac Lir– Légendairement dispersées sur les côtes et servant de balises magiques. -Cloch an Áir (Pierre de l'Affliction)– Pierre magique liée aux rituels de justice et de vengeance. - On peut aussi faire mémoire d'une pierre - de toute évidence, un mégalithe- honorée au solstice d'été à Lyon baptisée - c'est le cas de le dire- pierre de st Pothin ! La continuation indéniable de rites forts anciens, jusqu'au moyen-âge, remontant très probablement au néolithique, mais maintenus par les celtes .Que diraient-ils si ils connaissaient le sens du mot "Art" en gaélique écossais ( langue purement Celtique ) ?Gwenc'hlan Le Scouezec avait déjà souligné le double sens de "pierre" et "d'ours", mais il y en a un troisième !Ce troisième sens, est tout simplement le mot "Dieu".On devrait donc arrêter de tournicoter autour du pot ou de/des Dieu(x).Si on veut sortir du monde indo-européen, on peut se rappeler le sens du mot "bétyle"qui dans le monde sémitique a le sens de "maison de Dieu"; encore un hasard, sans doute.En revenant dans le monde indo-européen, faut-il rappeler que le nom d'Hermès et lié aux "hermaï", pierres ou tas de pierres placées le long des chemins....Apollon, lui aussi est lié à certaines pierres, par exemple celle de Mégare où il avait posé sa lyre, l'omphalos de Delphes, bien sur, le fait que ses temples soient aussi liés à des tombes ( cela fait penser à l'usage de pierres levées, comme simulacre,"double" de défunts, en Irlande.).Apollon est parfois "lithésios" représenté sous forme de pilier; tandis qu'à Delphes, Poséidon est présent sous forme d'une grosse pierre.Mais en dehors de cela, pour certains individus, seules les temples quadrangulaires doivent être des lieux de cultes, et non les pierres ni les lieux de culte extérieurs.M. Garcia Quintela mentionne en Galice de nombreux sites actifs à l'époque celtique- souvent liés à des sanctuaires de Lugus- où des rites sont opérés autour de pierres gravées ou creusées de formes de pieds ou autres ( rappel de l'intronisation du " roi de Brest" )Puisque certains groupes druidiques préfèrent s'inspirer de l'Hindouisme, des Védas et des traditions brahmaniques en reprenant presque mot pour mot leurs textes, autant éviter le révisionnisme des sources. Une telle approche relève en effet d'une forme de malhonnêteté intellectuelle, d'autant plus qu'elle discrédite leur discours en ignorant un peuple qui présente pourtant de nombreuses similitudes avec nos ancêtres. Saviez-vous, par exemple, que Ganesh est célébré pendant 10 jours en août (ce qui rappelle les 10 jours de Grannos ?) et qu'il est également vénéré sous forme de pierres teintes en rouge ? De même, le dieu Krishna est symbolisé par… une pierre noire ! Et lors de sa fête, les fidèles dansent en cercle autour des divinités. Ce qui est fascinant, c'est qu'au final, ces traditions offrent de nombreuses similitudes avec les anciens textes sur la question des pierres.- Chez les Kalash (peuple indo-européen ayant pu conserver beaucoup d'archaïsmes) , qui , ne se prétendant pas d'une quelconque "doctrine droite"ont un de leurs principaux cycles de fête autour du solstice d'hiver accomplissent leur rituélie la plus sacrée, en présence des Divinités autour d'un autel fait de pierres entassées dans un endroit reculé de la montagne au sein d'une clairière aménagée.Petit écart pour revenir sur l'importance magique et symbolique du cercle est indéniable, à travers toutes les cultures du monde.Chez les Celtes, il en va de même : Faut-il alors nier l'évidence et effacer les trois quarts des motifs celtiques ? Faut-il ignorer que toutes les structures anciennes d'Irlande sont circulaires ? Faut-il remettre en question l'identité même des Irlandais en tant que Celtes ?Nier l'existence du lieu de culte le plus ancien d'Irlande, où tous les peuples venaient faire des offrandes lors de la plus grande fête de l'année, relève d'une extravagante mauvaise foi. Ce sanctuaire, marqué par une pierre centrale recouverte d'or et entourée de douze pierres, est un témoignage flagrant de la sacralité du cercle dans la tradition celtique et les textes disent que plusieurs milliers de personnes y prenaient place. Même en Europe continentale, où la majorité des structures sont quadrangulaires, il existe de nombreux lieux de culte circulaires. Par exemple, 30 % des sites en Ille-et-Vilaine, six près d'Aleto, et même une structure pentagonale comme nous l'avons déjà mentionnée.Se limiter aux fouilles de Brunaux en excluant tout le reste, ce n'est pas faire preuve de rigueur, c'est faire preuve d'entêtement et d'aveuglement. D'ailleurs, de nouvelles études des données de fouilles légitiment une remise en cause de ses conclusions ("Ribemont(...)"l'interprétation y a joué un rôle excessif par rapport à l'exposé archéologique des faits." In " La Gaule du nord, de l'indépendance à l'empire Romain". Chap. 4. Michel Reddé. Presses Universitaires de Rennes, 2022). De plus, l'usage du cercle comme protection magique est attesté dans les textes anciens et constitue une base fondamentale de nombreuses traditions indo-européennes ( et même hors des cultures indo-européennes).Et ce n'est pas ce passage de la Mundaka Upanishad, évoquant le mandala cosmique ( mandala, en sanskrit veut dire cercle..), qui viendra contredire ces faits :"Au centre du monde bat l'invisible pulsation du Brahman, Infiniment subtil,En lui sont tissés le ciel et la terre,Découvre-le !Essence imperceptible des énergies subtiles du corps, Se diffusant comme des rayons autour du moyeu, C'est à leur jonction que se révèle le Brahman."Cette jonction, elle est au centre du cercle. Pourquoi s'en couper volontairement ?Le reconstructionnisme repose sur l'étude des textes mythologiques, de la comparaison, de l'histoire et de la rituélie. Choisir de se taire ou de nier certains éléments sous prétexte de recherche d'un druidisme dit « authentique », nous éloigne tout autant de la vérité.Si de trop nombreux groupes se réclamant, de manière plus ou moins légitime, du druidisme,font d'infâmes bouillies de pratiques fumeuses,mêlées d'ignorance, d'incohérence et de suffisance, voire, de pratiques déviantes ou sectaires, ce n'est pas la faute des anciens- qu'ils trahissent, ni la faute des lieux et formes de cultes variés - qu'ils polluent , et si on veut être sérieux et crédibles,il serait temps de ne pas tout mélanger.Ainsi, une fois de plus, les pierres ne sont que des matérialisations de divinités anciennes, tandis que les lieux de culte demeurent variés. Il est essentiel de ne pas confondre le fruit des recherches avec une dérive doctrinale qui, en sélectionnant uniquement certains fragments du travail des chercheurs, discrédite les autres et invente des théories new âge.Là où existent des éléments textuels et archéologiques, ceux-ci doivent rester, comme mentionné dans l'article précédent, la véritable boussole du Druidisme reconstructionniste.Source photographique : site — Raconte moi l'Irlande.